Les associations qui veulent agir en justice contre une soci\u00e9t\u00e9 fran\u00e7aise qui a caus\u00e9 des dommages, notamment environnementaux, \u00e0 l\u2019\u00e9tranger doivent-elles agir devant les tribunaux fran\u00e7ais ou les tribunaux \u00e9trangers pour obtenir des preuves de ces faits\u00a0?<\/p>\n
Dans une affaire r\u00e9cente, deux associations fran\u00e7aises de protection de l\u2019environnement souhaitaient poursuivre en justice une compagnie p\u00e9troli\u00e8re et gazi\u00e8re fran\u00e7aise en raison de dommages caus\u00e9s \u00e0 l\u2019environnement en R\u00e9publique d\u00e9mocratique du Congo.<\/p>\n
Dans cette optique, elles avaient engag\u00e9 une action en r\u00e9f\u00e9r\u00e9 devant le tribunal de Paris afin d\u2019obtenir la d\u00e9signation d\u2019un huissier de justice pour qu\u2019il proc\u00e8de \u00e0 des constatations dans les locaux de cette soci\u00e9t\u00e9 situ\u00e9s en France en vue d\u2019\u00e9tablir la preuve de faits pouvant engager sa responsabilit\u00e9. Cette action \u00e9tant bas\u00e9e sur l\u2019article\u00a0145 du Code de proc\u00e9dure civile selon lequel \u00ab\u00a0s\u2019il existe un motif l\u00e9gitime de conserver ou d\u2019\u00e9tablir avant tout proc\u00e8s la preuve de faits dont pourrait d\u00e9pendre la solution d\u2019un litige, les mesures d\u2019instruction l\u00e9galement admissibles peuvent \u00eatre ordonn\u00e9es \u00e0 la demande de tout int\u00e9ress\u00e9, sur requ\u00eate ou en r\u00e9f\u00e9r\u00e9\u00a0\u00bb.<\/p>\n
Le juge des r\u00e9f\u00e9r\u00e9s et la cour d\u2019appel avaient estim\u00e9 que cette demande des associations \u00e9tait irrecevable au motif qu\u2019elles ne justifiaient pas que la loi congolaise leur donnerait qualit\u00e9 pour agir au fond au titre des dommages environnementaux survenus en R\u00e9publique d\u00e9mocratique du Congo.<\/p>\n
Saisi de ce litige, la Cour de cassation n\u2019a pas valid\u00e9 cette solution. En effet, elle a estim\u00e9 que la qualit\u00e9 \u00e0 agir d\u2019une association pour la d\u00e9fense d\u2019un int\u00e9r\u00eat collectif en vue d\u2019obtenir une mesure d\u2019instruction sur le fondement de l\u2019article\u00a0145 du Code de proc\u00e9dure civile ne devait pas s\u2019appr\u00e9cier au regard de la loi \u00e9trang\u00e8re applicable \u00e0 l\u2019action au fond, en l\u2019occurrence celle de la R\u00e9publique d\u00e9mocratique du Congo.<\/p>\n
Ainsi, pour la Cour de cassation, la qualit\u00e9 \u00e0 agir des associations doit s\u2019appr\u00e9cier selon la loi du tribunal saisi (donc la loi fran\u00e7aise) en ce qui concerne les conditions d\u2019exercice de l\u2019action en r\u00e9f\u00e9r\u00e9 bas\u00e9e sur l\u2019article\u00a0145 du Code de proc\u00e9dure civile et selon la loi des associations (donc la loi fran\u00e7aise) en ce qui concerne leur capacit\u00e9 \u00e0 agir en justice (capacit\u00e9 limit\u00e9e \u00e0 leur objet).<\/p>\n
Cette solution de la Cour de cassation facilite l\u2019acc\u00e8s aux preuves pour les associations fran\u00e7aises qui souhaitent intenter une action en justice en raison d\u2019un pr\u00e9judice, qu\u2019il soit environnemental ou d\u2019une autre nature, survenu dans un pays \u00e9tranger et commis par une soci\u00e9t\u00e9 fran\u00e7aise.<\/p>\n