Les soci\u00e9t\u00e9s commerciales sont tenues de d\u00e9poser leurs comptes annuels au greffe du tribunal de commerce dans le d\u00e9lai d\u2019un mois \u00e0 compter de leur approbation par l\u2019assembl\u00e9e g\u00e9n\u00e9rale des associ\u00e9s. \u00c0 d\u00e9faut, le pr\u00e9sident du tribunal de commerce peut adresser au dirigeant de la soci\u00e9t\u00e9 concern\u00e9e une injonction de d\u00e9poser les comptes annuels dans un bref d\u00e9lai (un mois), sous astreinte.<\/p>\n
\u00c0 ce titre, dans une affaire r\u00e9cente, l\u2019associ\u00e9 unique et pr\u00e9sident d\u2019une soci\u00e9t\u00e9 par actions simplifi\u00e9e unipersonnelle (Sasu) avait \u00e9t\u00e9 enjoint par le pr\u00e9sident du tribunal de commerce de proc\u00e9der, dans un d\u00e9lai d\u2019un mois et sous astreinte de 100\u00a0\u20ac par jour de retard, au d\u00e9p\u00f4t des comptes annuels de sa soci\u00e9t\u00e9 pour les exercices\u00a02015, 2016 et\u00a02017. Faute de s\u2019\u00eatre ex\u00e9cut\u00e9, il avait \u00e9t\u00e9 condamn\u00e9 \u00e0 payer une somme de 3\u00a0000\u00a0\u20ac en liquidation de l\u2019astreinte.<\/p>\n
L\u2019int\u00e9ress\u00e9 avait alors contest\u00e9 cette injonction en faisant valoir que, puisqu\u2019il \u00e9tait le seul associ\u00e9 de la soci\u00e9t\u00e9, elle l\u2019obligeait \u00e0 d\u00e9voiler des informations personnelles relatives \u00e0 sa situation patrimoniale. Et que le pr\u00e9sident du tribunal de commerce avait port\u00e9 ainsi une atteinte disproportionn\u00e9e \u00e0 la protection de ses donn\u00e9es \u00e0 caract\u00e8re personnel, protection garantie par la Convention europ\u00e9enne des droits de l\u2019homme.<\/p>\n
Mais les juges n\u2019ont pas \u00e9t\u00e9 sensibles \u00e0 cet argument. Car pour eux, si les donn\u00e9es portant sur le patrimoine d\u2019une personne physique rel\u00e8vent bel et bien de sa vie priv\u00e9e, les comptes annuels d\u2019une Sasu ne constituent que l\u2019un des \u00e9l\u00e9ments n\u00e9cessaires \u00e0 la d\u00e9termination de la valeur des actions que poss\u00e8de son associ\u00e9 unique. En outre, les actions d\u00e9tenues par ce dernier ne constituent qu\u2019une partie de son patrimoine, lequel est distinct de celui de la soci\u00e9t\u00e9. Le d\u00e9p\u00f4t des comptes de la soci\u00e9t\u00e9 ne r\u00e9v\u00e8le donc qu\u2019une partie de ce patrimoine.<\/p>\n
Les juges en ont donc conclu que l\u2019atteinte port\u00e9e au droit de la protection des donn\u00e9es \u00e0 caract\u00e8re personnel de l\u2019associ\u00e9 unique d\u2019une Sasu lors de la publication des comptes de celle-ci est proportionn\u00e9e au but l\u00e9gitime poursuivi par cette obligation de publication, \u00e0 savoir la d\u00e9tection et la pr\u00e9vention des difficult\u00e9s des entreprises.<\/p>\n